"Trécarré": Quand l'Acadie exporte sa médiocrité – Gaspillage public et copinage en festival
Quand les fonds publics sont en jeu et que les résultats puer, il devient nécessaire de poser les vraies questions sur nos priorités culturelles.


Critique: "Trécarré" - Un exemple de gaspillage culturel acadien au Festival de Normandie
Par Claude Edwin Theriault
Dans l'univers du cinéma acadien, certaines décisions font grincer des dents plus que d'autres. L'envoi du documentaire "Trécarré" en France représente l'une de ces décisions qui méritent d'être examinées à la loupe. Quand les fonds publics sont en jeu et que les résultats sont loin d'être à la hauteur, il devient nécessaire de poser les vraies questions sur nos priorités culturelles.
Un choix politique plutôt qu'artistique
Le Festival International du Cinéma Francophone en Acadie (FICFA) a encore une fois montré sa préférence pour les connections politiques plutôt que pour la qualité artistique. "Trécarré" s'est retrouvé comme seul film originaire de l'Acadie envoyé en Normandie, non pas grâce à ses qualités cinématographiques exceptionnelles, mais bien grâce à un réseau bien établi de contacts au sein des institutions culturelles.
Ce qui frappe d'emblée, c'est que ce documentaire n'a même pas été sélectionné pour la compétition officielle. Et pour cause! Les documentaires ternes et sans ambition narrative n'attirent guère l'attention des festivaliers français, habitués à un cinéma plus dynamique et innovant. Pourtant, nos bureaucrates culturels persistent à présenter ce type de contenu comme le meilleur de ce que l'Acadie peut offrir.
"On a envoyé quoi en France? Un film qui parle à parsonne sauf les vieux bureaucrates de Moncton," m'a confié un réalisateur acadien qui préfère garder l'anonymat. "C'est comme si on voulait confirmer tous les stéréotypes sur notre cinéma."
Une réalisation technique déficiente
La technique cinématographique de "Trécarré" laisse beaucoup à désirer. Environ 30 minutes du film consistent en de vieilles séquences vidéo granuleuses, mal numérisées et présentées sans véritable contexte narratif. Cette approche paresseuse du montage transforme l'expérience de visionnement en épreuve d'endurance plutôt qu'en découverte culturelle.

Plus problématique encore, l'équipe de production a oublié d'ajouter des sous-titres, rendant le film pratiquement incompréhensible pour le public français. L'accent acadien, déjà difficile à saisir pour les francophones européens, devient un obstacle insurmontable sans aide textuelle. Plusieurs spectateurs ont quitté la salle après seulement quelques minutes, incapables de comprendre ce "français hillbilly", comme l'a qualifié un journaliste normand présent à la projection.
"J'avais hâte de découvrir la culture acadienne, mais je n'ai rien compris," a déclaré Marie-Claire Dumont, spectatrice déçue. "Sans sous-titres, c'était comme regarder un film en langue étrangère sans traduction."
Le coût exorbitant d'une vision étroite
Les dépenses gouvernementales pour l'envoi de "Trécarré" au festival français représentent un gaspillage flagrant des ressources culturelles acadiennes. Entre les frais de déplacement, d'hébergement et de promotion, plusieurs dizaines de milliers de dollars ont été investis pour un résultat proche du néant en termes de rayonnement culturel.

Ces fonds auraient pu soutenir de jeunes cinéastes acadiens innovants, ou être investis dans des coproductions internationales qui auraient véritablement mis en valeur notre créativité. Au lieu de cela, ils ont servi à confirmer les préjugés sur une culture acadienne repliée sur elle-même, obsédée par son passé et incapable de se renouveler.
Le problème n'est pas tant de raconter notre histoire, mais plutôt la façon dont on choisit de la raconter. D'autres cinéastes acadiens comme Phil Comeau ont démontré qu'il était possible de parler de nos racines tout en créant des œuvres universelles et accessibles. Avec plus de 50 ans de carrière et de nombreux prix internationaux, Comeau a su trouver le juste équilibre entre tradition et innovation.
Un cercle vicieux d'autopromotion
Ce qui se joue avec "Trécarré" illustre parfaitement le problème systémique de notre scène culturelle institutionnalisée. Un petit groupe de bureaucrates acadiens, majoritairement blancs, hétérosexuels et obsédés par une vision nostalgique de l'Acadie, continue de s'auto-congratuler en finançant des projets qui ne résonnent qu'avec eux-mêmes.
Cette boucle de rétroaction politique perpétue une vision passéiste et unidimensionnelle de notre culture. Pendant ce temps, des voix plus diverses et plus contemporaines peinent à trouver financement et reconnaissance. Le résultat est une production culturelle déconnectée des réalités actuelles et incapable de dialoguer avec le monde.
La jalousie envers des succès durables comme ceux de Phil Comeau semble motiver certains cinéastes amateurs à utiliser leurs connexions politiques pour promouvoir des œuvres médiocres. "Trécarré" apparaît ainsi comme le projet vaniteux d'un aspirant réalisateur qui, à défaut de talent, mise sur ses relations pour faire avancer sa carrière.
Notre culture mérite mieux. Notre public mérite mieux. Et nos fonds publics méritent certainement un investissement plus judicieux.

Foire Aux Questions (FAQ)
Pourquoi le film "Trécarré" a-t-il été choisi pour représenter l'Acadie en France?
Le choix semble davantage lié aux connexions politiques de l'équipe de production qu'à la qualité artistique du film. Le processus de sélection manque de transparence et privilégie souvent des projets portés par des personnes bien établies dans le réseau culturel institutionnel acadien.
Quel a été l'accueil du public français face à ce documentaire?
L'accueil a été très froid. L'absence de sous-titres et la difficulté à comprendre l'accent acadien ont conduit plusieurs spectateurs à quitter la salle. Les retours médiatiques ont été quasiment inexistants, confirmant le manque d'impact du film.
Combien a coûté l'envoi de "Trécarré" au festival de Normandie?
Bien que les chiffres exacts ne soient pas publics, les estimations suggèrent qu'entre transport, hébergement, promotion et frais divers, le coût total dépasse largement les 25 000 dollars – une somme qui aurait pu financer plusieurs projets de jeunes cinéastes acadiens.
Existe-t-il d'autres films acadiens qui auraient mérité cette visibilité internationale?
Absolument. Plusieurs courts-métrages et documentaires produits récemment par de jeunes réalisateurs acadiens abordent des thématiques contemporaines avec une fraîcheur et une originalité qui auraient davantage capté l'attention d'un public international.
Comment améliorer la représentation du cinéma acadien à l'international?
Il faudrait d'abord diversifier les comités de sélection pour inclure des voix plus jeunes et variées. Ensuite, investir dans la qualité technique et narrative des productions, notamment en termes de sous-titrage et d'accessibilité. Finalement, privilégier les projets qui, tout en célébrant notre identité, parviennent à parler un langage cinématographique universel.